06/09/2023

Il est temps de remplacer les paroles par des actes !
L'Edito de votre Maire
Au moment où j’écris cet éditorial, soit plus de 15 jours après les émeutes, nous restons toujours aussi désemparés et bouleversés face à cette violence qui, en cinq nuits et autant de journées, s’est déchaînée sur tout le territoire, des centres-villes de grandes agglomérations aux communes les plus petites, laissant sur le carreau des milliers de victimes directes d’incendies, de dégradations ou de vols.
Un bilan effarant qui aurait dépassé celui des émeutes de 2005, qui avaient pourtant duré trois semaines ! Mais aujourd’hui, force est de constater que le contexte et les modes opératoires ont évolué. Les émeutes qui ont touché des centaines de communes en France ont changé de nature, avec une intensité inédite, des niveaux de violence extrême, des pillages de commerces, des attaques contre des services publics, contre des fonctionnaires et contre des élus provoquant la panique à Marseille, Lyon, Toulouse ou Strasbourg, communes parfois noyées sous les lacrymogènes, le bruit des explosions et l’odeur des incendies et ceci malgré un dispositif policier considérable, avec plus de 40 000 fonctionnaires mobilisés, dont des unités comme celles des policiers du RAID ou des gendarmes du GIGN et le recours à des blindés de la gendarmerie. Le Ministre de la cohésion des territoires Christophe BECHU a notamment précisé le 4 juillet : « c’est une géographie nouvelle, dont on n’a pas l’habitude, 553 communes ont été touchées en huit jours d’émeutes sur tout le territoire français, dont 170 n’avaient pas de quartier politique de la ville, appellation administrative des quartiers autrefois dits sensibles, populaires ou prioritaires ».
Plus de 15 jours après les émeutes, nos responsables tentent toujours de prendre du recul sur le phénomène et sur les moyens d’y répondre. Une chose est sûre, une réponse doit notamment venir du sommet de l’Etat. Alors les consultations se multiplient ainsi que les échanges téléphoniques avec des personnalités, avec des relais. Des maires ont même été invités car pour le Président de la République, le retour au calme est passé, une nouvelle fois, par le filtre des élus locaux.
Quand cela ne va plus, c’est auprès des maires, que l’on se tourne : 302 élus pendant plus de 3 heures dans la salle des fêtes de l’Elysée !
Bien sûr il faut saluer cette démarche, car la désescalade passe aussi par ce soutien à tous ces élus qui, tout en bas, ont enchainé des nuits blanches, ont fait de la médiation et, parfois, fait barrage de leur corps, pour protéger nos bâtiments publics. Heureusement qu’il y a des « Vincent JEANBRUN, Maire de Lhay-les-Roses » pour ne pas jeter et continuer à servir la République !
Les maires ont amorti la crise, en 2018. Avec les préfets, en 2020, ils ont cogéré la tempête de la Covid. Les voilà à nouveau sollicités aujourd’hui. Alors le Président de la République reprend la formule qui a permis l’apaisement au moment des Gilets jaunes : le grand débat. Ces derniers jours, on a revu le micro circuler et le Président, noircir son petit carnet. Mais concrètement, qu’est-ce qui ressort de ce grand débat renoué avec les maires ? Vous trouverez autant de réactions, enjouées ou allergiques, qu’il y a d’étiquettes politiques.
Le problème est qu’un mandat et demi s’est déjà écoulé et que les élus de la République sont toujours en attente de plus de décentralisation. Le Président de la République a bien voulu reconnaitre que sur le plan Borloo abandonné, qu’il avait été maladroit à l’époque. Il a également plaidé pour un changement de méthode dans la construction des politiques publiques, et pour davantage de décentralisation et de simplification pour clarifier les responsabilités des divers échelons territoriaux. Il a aussi proposé de remettre les maires au cœur des décisions d'attribution des logements sociaux de leurs villes et de clarifier les compétences sur le logement.
Mais le Président de l’Association des Maires de France ne l'entend plus ainsi : « A quoi bon ressasser un diagnostic archi-connu ? Il faut de l’action, pas de la thérapie de groupe. »
Mais quelle action ? Frapper au portefeuille les parents des délinquants ? Ou mettre le paquet sur l'égalité des chances ? Le Président a déjà en partie répondu : il n’a pas parlé « argent », mais changement de méthode. Confirmant la fin du « quoiqu’il en coûte ».Chaque maire invité doit maintenant nourrir la boîte à idées présidentielle. Un point d’étape avec les maires est programmé début septembre.
A cette occasion, il est souhaitable que les maires disent au Président, comme à leurs administrés, comme aux responsables publics de haut niveau qu’ils ont raison d’apprécier le retour au calme après la tempête, totalement raison. Mais en même temps il serait très dangereux de se laisser bercer dans l’insouciance de l’apparence trompeuse, car les amateurs et les spécialistes chevronnés de l’anarchie et du désordre sont très malins. Ils n’attendent que l’interruption de la vigilance pour frapper, encore plus fort, au moment le plus inattendu, pour déstabiliser, pour inquiéter et pour s’imposer grâce à la peur et à la résignation.
Parce qu’ils sont les personnages publics les plus proches de la population, les maires sont en droit d’attendre du pouvoir central un soutien sans faille qui rassure les citoyens, non pas d’une manière provisoire, mais d’une manière durable, voire même définitive. Ce qu’ils attendent du pouvoir central, c’est une analyse lucide, réaliste d’une situation dont il est indispensable de ne pas dissimuler la gravité et de prendre en conséquence les décisions qui s’imposent.
Liste de pièces jointes
